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deur. Un nouvel empire s’étendait, limité au nord par le Danube, de Vienne à Palerme et de Gênes à Constantinople. La courbe du grand fleuve, jadis océan entre deux mondes, arrête longtemps les Slaves, malgré les complicités qui travaillaient pour eux à l’intérieur du cercle…. Et on imaginerait toute une histoire future. — Mais c’est trop facile.)

L’Italie offre aux Barbares (en toute hypothèse) une résistance imprévue. Sa défense, c’est l’éblouissement. Devant ce spectacle d’une vie extérieure régie par la recherche de la volupté, l’envahisseur s’adoucit, enfin heureux de vivre ; les armées fondent ; Capoue renaît dans les roses latines et dans les lys florentins. Comment imposer au sourire milanais la rudesse d’une langue mal élevée ? Si une des langues de l’Europe doit survivre à la conquête de l’Europe, ce sera l’italien, la moins souillée, la plus souple, la plus fraîche et, en même temps, la plus égoïste et la plus fière des sœurs romanes. La paresse du peuple italien, sa délicieuse ignorance lui ont forgé à son insu une force linguistique de pre-