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diqués par Dumouchel, ils apprirent le secret de tous les genres ». Cependant les deux bonshommes trouvent un peu subtiles les remarques de M. Albalat et ils sont consternés d’apprendre que le Télémaque est mal écrit et que Mérimée gagnerait à être condensé. Ils rejettent M. Albalat et se mettent sans lui à leur histoire du duc d’Angoulême.

Je ne suis pas surpris de leur résistance ; peut-être ont-ils senti obscurément que l’inconscient se rit des principes, de l’art des épithètes et de l’artifice des trois jets gradués. Que le travail intellectuel, et en particulier le travail d’écrire, échappe en très grande partie à l’autorité de la conscience, si M. Albalat l’avait su il aurait été moins imprudent et n’aurait pas divisé les qualités d’un écrivain en deux sortes : les qualités naturelles et les qualités que l’on peut acquérir, — comme si une qualité, c’est-à-dire une manière d’être et de sentir, était quelque chose d’extérieur et qui se surajoute comme une couleur ou une odeur ! On devient ce que l’on est, et cela sans même le vouloir et malgré toute volonté adverse. La plus longue patience ne peut changer en imagination visuelle une imagination aveugle ; et celui qui voit le paysage dont il transpose l’aspect en écritures, si son œuvre est gauche, elle est