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Parmi les autres dieux vicinaux, l’un des plus aimés était Silvanus. Les inscriptions en son honneur sont fort nombreuses. On le qualifiait volontiers de sanctus et il était le maître des Lares :

                                SILVANO
                             SANCTO. SACRO
                             LARUM. CÆSARI

C’était un saint tout fait. Il passa directement sur les autels chrétiens sous ce nom de saint Silvain que lui donnait déjà la piété populaire. Mais Priape, trop compromis, dut changer de nom ; il prit celui de Sanctus Vitus, afin que les chrétiennes pussent invoquer sans rougir le dieu pour qui les femmes eurent toujours une particulière dévotion. Ainsi, en quelques siècles, la religion de la virginité et de la pudeur en était arrivée, sous la pression du peuple, à tolérer sur ses autels le maître des luxures, exemple amusant de la puissance naturelle de la vie ! Mais il ne faut pas s’y méprendre ; canonisé, Priape devint fort décent et enfin matrimonial. Il ne dénoue plus l’aiguillette qu’au profit de la fécondité ; le démon travaille à peupler le paradis et à donner aux anges des frères[1].

  1. Cf. G.H. Nieupoort, Rituum qui olim ap. Roman. obtinuerunt Liber ; Trèves, 1723.