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Dans le Journal inédit d’un pasteur calviniste, je relève souvent ces cris : « Jésus, rappelle-toi tes promesses !… Tu m’as dit, en 1836, que tu serais toujours avec moi… O Jésus, en 1836, dans cette galerie, seul, en prière, tu me promis de me tenir par la main, de m’accompagner, de me soutenir jusqu’à la mort.. ». Il cite à son Dieu les dates où cette promesse a été tenue : le 23 novembre 1837, chez Mme de N***, à Wahern en 1840, à Genève, en 1842, etc. ; et il dit très franchement à son divin contractant : « Tu as tenu ta parole depuis trente-quatre ans, je n’en pourrais dire autant, sans doute, je suis un pécheur, mais je compte sur ta bonté ». C’est l’appel à la bonté des dieux qui fait l’originalité de ces sortes de contrats. Il faut bien que les hommes, s’ils ont la notion abstraite de la bonté, la situent quelque part ; cela ne peut être en eux-mêmes, lâches, cruels et parjures : Dieu est fait de ce qu’il y a de moins humain dans l’homme.

Le contrat est l’essence des religions. Il s’applique à toutes indifféremment et les explique toutes. Un bon traité du contrat religieux serait un livre indispensable pour l’étude de la psychologie humaine, en même temps qu’il fonderait l’histoire scientifique de la religion, qui est encore à peine pressentie.