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point inédite ; elle fut celle du violent et superbe Tertullien, celle de l’autoritaire et rigoureux saint Bernard, mais jamais celle des papes romains qui firent de Rome la double capitale du christianisme et du paganisme et qui, peut-être dès les temps anciens, rangèrent autour d’eux, témoins de leur double souveraineté, les reliques des saints nouveaux et les effigies des anciens dieux.

Il y a un art catholique ; il n’y a pas d’art chrétien ; le christianisme évangélique est essentiellement opposé à toute représentation de la beauté sensible, soit d’après le corps humain, soit d’après le reste de la nature. Saint Paul ne sait pas ce que c’est qu’un temple chrétien ; encore moins, une statue chrétienne ; il n’a pas la notion qu’une chose belle puisse être un ornement ajouté à la beauté d’un cœur pur. Si un tel christianisme s’était développé, les civilisations anciennes nous seraient inconnues ; la religion de saint Paul demandait impérativement la destruction des temples qui sont devenus les basiliques italiennes, le brisement des idoles, ces statues qui ont conservé dans le monde l’idée d’un art désintéressé et purement humain ; la littérature profane eût été annihilée comme le reste ; la propagation de l’Évangile eût été la propagation