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mirent à rire (troisième méthode) ; ensuite, ils proférèrent des jugements : puisque ces choses, ces proses et ces poèmes, ne sont pas ordonnées à l’imitation des dernières littératures ou des œuvres célébrées par les manuels, elles doivent provenir d’une source anormale, car elle ne nous est pas familière, — mais laquelle ? Il y eut des tentatives d’explication au moyen du préraphaélisme ; elles ne furent pas décisives ; elles furent même un peu ridicules, tant l’ignorance était de tous côtés profonde et invulnérable. Mais vers ces années-là un livre parut qui soudain éclaira les intelligences. Un parallèle inexorable s’imposa entre les poètes nouveaux et les obscurs versificateurs de la décadence romaine vantés par des Esseintes. L’élan fut unanime et ceux mêmes que l’on décriait acceptèrent le décri comme une distinction. Le principe admis, les comparaisons abondèrent. Comme nul, et pas même des Esseintes, peut-être, n’avait lu ces poètes dépréciés, ce fut un jeu pour tel feuilletoniste de rapprocher de Sidoine Apollinaire, qu’il ignorait, Stéphane Mallarmé qu’il ne comprenait pas. Ni Sidoine Apollinaire ni Mallarmé ne sont des décadents, puisqu’ils possèdent l’un et l’autre, à des degrés divers, une originalité propre ; mais c’est pour cela même que le mot