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LA

Route Perdue

par R. M. GOURAUD D’ABLANCOURT

PREMIERE PARTIE

I

UNE FETE AU VAL D’OMBRE

— Bonjour, Colonel, charmé de vous retrouver à cette jolie réunion en ce château enfin rouvert ! J’avais vu dans le journal votre nomination dans un régiment de l’Est.

— Oui, c’est une vraie chance de vous revoir ici, cher Monsieur. Je ne l’espérais pas. Vous habitez dans le rayon ?

— Il y a des siècles que les Runkerque — dont hélas, je suis le dernier — vivent dans leur vieux manoir planté sur la rive belge de la Semois où il se mire. Regardez l’autre bord en face, quand le vent écarte les branches des hauts peupliers, on peut entrevoir mes tours grises.

— C’est un site ravissant. Alors vous n’avez qu’à passer la rivière pour être ici.

— Oui. La rivière n’est pas toujours facile à traverser, mais j’aime cela. Je crois, mon ami, que nous sommes les premiers arrivés au Val d’Ombre.

— Non, j’aperçois des automobiles dans l’avenue.

— Vous êtes venu à pied, par la traverse ?

— J’ai profité de cette magnifique après-midi de printemps. Je marchais sur un tapis de mousse parsemé de fleurettes blanches.