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une heure. Yolaine venait de sortir du compartiment, elle l’interpella :

— Je cherche l’employé qui loue des oreillers, ma mère en voudrait un de plus ; avez-vous aperçu cet homme Monsieur ?

— Oui, Mademoiselle, il a franchi le soufflet, venez, nous allons le joindre. Us allèrent vivement. Par un singulier oubli, la porte sur la voie était ouverte :

— Oh ! laissez-moi avant regarder la nuit. A travers les vitres, on ne voit que le reflet du wagon.

— Quelle imprudence, fit Roc-Marie, je vais la fermer.

Elle se pencha un peu. Au même instant, un choc formidable jeta la porte sur elle la lançant au dehors. Roc-Mj. rie poussa un cri ; mais il était lui-même renversé brutalement le wagon entier se couchait en se brisant au milieu d’un craquement de vitres en éclats, de cris effrayante. Il essaya de se relever, embarrassé de débris, ahuri, il y arriva, sans grand mal, à part quelques coupures aux mains et au visage.

— Maman !

A force de cordage et d’efforts, il parvint à ramper jusqu’à l’endroit où il avait laissé sa mère. De toutes parts on entendait des hurlements ; puis un cri sinistre entre tous : le feu !

Roc-Marie montait par-dessus la cloison crevée des compartiments appelant toujours : Maman ! Une voix enfir répondit :

— Là, sous des choses, je ne puis me dégager. De toutes ses forces, il écarta des morceaux de bois qui tenaient la malheureuse coincée entre eux. Il l’enleva, franchit un trou béant et sauta dans l’ombre. Une fumée intense d’où commençaient à sortir des flammes l’étouffait. Ils étaient tombés sur la terre dans des herbes. Lui n’avait pas de blessures, mais elle ! On ne peut se faire une idée des cris, des imprécations, de l’horreur sans nom qui régnait dans cette nuit, que, de plus en plus éclairait l’incendie activé par un vent vi Tînt. A cette sinistre lumière, il aperçut sa mère, le visage plein de sang, un bras inerte, les yeux fermés.

— Mon Dieu !

Il regardait autour de lui, où trouver du secours ? Des gerbes de flammes montaient très haut, la campagne au loin s’irradiait.

— Ah ! une ferme, là-bas, au bout du champ.