— Et il a rencontré le bonheur en route, acheva le Colonel.
Maintenant les danseurs couraient une farandole dans le jardin à la française devant le château. Renaud menait la bande. En passant près de Roc-Marie, Armande happa son beau-frère pour l’entraîner en riant. Les deux vieux camarades se regardèrent :
— C’est vrai qu’elle est gentille, fit Gislain de Runkerque, une piquante brune. Allons prendre un verre de porto. Colonel ; puis, j’irai dénouer la chaîne de mon bateau.
II
LA DOUAIRIERE
Comme ils traversaient les salons pour se rendre au buffet, ils aperçurent, dans la tour du centre dont on avait fait un petit boudoir, la douairière d’Héricourt en compagnie de la maîtresse de maison. Assises sur un divan, elles avaient devant elles un guéridon supportant des tasses de chocolat, des brioches et des friandises.
— Venez partager la dînette, Runkerque, appela Pauline.
— Faites-vous servir quelque chose, ajouta la duchesse.
Elle tendait ses doigts étincelants de bagues au vieux gentilhomme qui les effleurait de sa grise moustache.
— J’ai l’honneur, Madame, de vous présenter le colonel Loisel, qui garde, avec son régiment, les marches de nos frontières près d’ici.
Elle eut le même geste élégant envers l’officier qui sut y répondre de la même manière.
— Colonel, j’aime l’armée, bien qu’aujourd’hui l’uniforme ait bien perdu de son prestige. Mon père était au Royal-Dragon. J’habite à deux lieues d’ici et j’ai des réceptions de voisinage le jeudi pour ma « coterie ». On joue au lansquenet, à la brisque, aux dominos ; des fois la jeunesse fait une courante. Si vous voulez en être, Monsieur, la porte s’ouvrira pour vous.