Page:Gouraud d’Ablancourt - La Route perdue, 1930.djvu/11

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Runkerque se retourna vite :

— Ah ! mon petit Roc-Marie, nous te cherchions. Je veux te présenter au colonel Loisel, un camarade de promotion de ton père.

Le jeune homme serra la main tendue, tandis qu’une expression émue paraissait dans ses yeux limpides.

— Je suis bien charmé de vous connaître, mon Colonel. Vous êtes sans doute venu ici du temps de mon père.

— Non. Nous étions en Algérie, mon jeune ami. Comme vous ressemblez à votre père. Si l’on ne vous eût nommé, je vous aurais reconnu.

— J’en suis très fier. J’ai mis une fois l’uniforme de papa... mais c’était bien sot ; maman s’est évanouie en me voyant. Je ne recommencerai pas.

— Pourquoi, mon enfant. Après une surprise impressionnante, au contraire, votre chère maman n’aimerait-elle pas à voir le fils relever l’épée du père.

— C’était jadis le rôle des cadets, approuva le Belge.

— Plutôt le froc ou le petit collet, mon ami Gislain Vous avez vu mon frère ?

— De loin.> Il dansait. Et ta belle-sœur, Roc, elle te plaît ?

— Extrêmement. Elle est l’opposé de nous, les deux pôles.

— Donc l’étincelle ! On dit dans le pays qu’elle n’est pas française.

— Quelle erreur ! Il n’y a pas même un étranger si loin qu’on remonte dans sa famille. Les Saint-Yrieix sont des Arvernes. Ce qui a fait croire ce conte, c’est qu’Armande est née à Calcutta ; son père était consul général là-bas.

— Et maintenant ? Il est toujours dans la diplomatie ?

— Il a donné sa démission. Il se plaisait tellement dans l’Inde qu’il a acheté une propriété qui est un rêve au pied de l’Himalaya : la villa des Lotus, et la famille y est installée.

— Comment donc ont pu se connaître les jeune ? époux ?

— D’abord parce que les mariages sont écrits dans le cieL La Providence s’est servie d’une traversée qu’ils ont faite ensemble. La marquise de Val d’Ombre voulait pour Renaud une instruction complète. Afin de mieux l’achever, elle l’envoya avec son précepteur dans les pays lointains.