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IX


Dès lors, ce fut une habitude, le comte Hartfeld trouva un charme extrême à revenir causer à la Roche-aux-Mouettes.

Il s’asseyait dans la cour, en face de la mer et écoutait les longs récits de la douairière, ravie de se replonger dans le passé, avec un auditeur attentif. Rarement, Michelle était près d’eux. Ses occupations multiples la tenaient éloignée et quand, par hasard, elle passait près du groupe, le visiteur se levait et la saluait avec un profond respect.

Un soir qu’il s’attardait encore plus que de coutume, la douairière dit, légèrement moqueuse :

« Comte, vous allez encore vous laisser prendre ici par la marée. »

Il sourit, et :

« Marquise, en effet, je me suis laissé prendre ici, mais ce n’est pas par la marée. Voulez-vous me permettre de vous exprimer ma pensée, mon plus vif désir et m’aider de votre bienveillance, car, réellement, je ne sais comment aborder ce qui me tient tant au cœur. Moi, soldat, la peur d’un refus me rend tremblant.

— Vous pouvez parler, mon cher comte, et quelle que soit votre demande, ma sympathie vous est acquise.

— Même, si je vous demandais à vous priver en ma faveur de votre plus cher trésor ?