VII
« Alors, mon vieux marsouin, il y a beaucoup de baigneurs cette année ? interrogea Michelle, pendant que son compagnon, assis à l’arrière, l’œil sur sa voile tendue au vent de norouà, filait l’écoute.
— Des baigneurs ? une flotte ; paraît que pas un chalet à Dinard reste à louer.
— D’où viennent-ils tous ces gens ?
— De partout, faut croire que leur pays vaut pas le nôtre, puisqu’ils jettent l’ancre chez nous. Ça m’arrange, moi. Je ne vas plus sur le banc de Terre-Neuve mettre mes hameçons, je gagne mon pain ici avec ma pêche.
— Et Minihic ne partira pas mousse ?
— Si, tout de même, mon fils, comme moi, verra Saint-Pierre et Miquelon. Un voyage au long cours éprouve le cœur du marin.
— Moi, si j’avais un enfant, je ne l’enverrais pas au loin, observa Michelle. Dites donc, Lahoul, qui est-ce qui loge là-haut sur la falaise ?
— À cette villa Roussalka ? un drôle de nom qui n’est ni breton, ni français ; paraît que c’est des Russes, des gens venus une fois dans un beau yach : ils allaient en Angleterre, un coup de vent les obligea à mouiller en rade de Saint-Malo. Ils ont visité la côte dans leur chaloupe et se sont enthousiasmés de notre baie. Alors, riches comme des