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« Ceci, grand’mère, est mon ouvrage, vous allez à présent vous reposer ; l’heure de ma rentrée au foyer sera celle de votre tranquillité, et toi, vieille Rosalie, tu n’iras plus arroser au jardin, ce sera mon plaisir et ma distraction ; au lieu du petit parterre du couvent que je cultivais pour rire, j’aurai la joie de vous servir ma récolte. »

Michelle souriait en disant ces paroles, allant, venant déjà pour mettre le couvert, préparer le repas du soir, et les deux femmes la suivaient d’un œil attendri qui se voilait chez Rosalie d’une infinie gratitude, et chez la marquise d’une tristesse reconnaissante en face de l’obligation, si peu en rapport avec son rang social, mais si nécessaire, qu’assumait sa petite-fille.

Une autre charge allait encore tomber sur les épaules si faibles de la douairière de Caragny : Mme Carlet, qui depuis la mort de son mari vivait dans une maison de santé payée par l’intermédiaire du prêtre qui avait montré jadis tant de bonté à la famille, se trouva tout à coup forcée d’en sortir. Le curé avait été changé de paroisse et la protectrice était morte. De plus, la pauvre femme, qui jouissait d’une parfaite santé physique, n’avait recouvré au moral qu’une intelligence obscure où un peu de la folie des grandeurs germait au milieu d’une absence absolue de jugement.