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enfants. Je suis aise qu’il ait fui. Quant à votre femme, je la surveille de près, puissiez-vous revenir bientôt, Hans, et cette abominable guerre prendre fin, sur le succès de nos armes.

Edvig. »

Mme Rozel et son blessé demeurèrent longtemps absorbés tous deux dans leurs pensées. La première soigna le second avec encore plus de dévouement, d’attention, sa femme avait secouru son Georges !

Les jours suivants, ils causèrent ensemble de ceux qu’ils aimaient, leurs relations n’étaient plus banales. Ils oubliaient les rivalités de leurs nations, pour ne s’occuper que d’eux, se rappeler de vieilles choses, revivre des heures heureuses passées, où chacun mettait ses souvenirs. Chaque soir, ils priaient ensemble. L’aumônier venait voir l’officier allemand et de plus en plus, la foi d’Hans s’affirmait en notre religion. Pendant ces longues heures de souffrance, le mari de Michelle réfléchissait, sans nulle distraction extérieure. Il repassait en son esprit la vie exemplaire de sa femme aux prises avec la malveillance de sa sœur, et il se disait qu’une conviction puissante et une grâce divine devaient être le secret de cette incomparable vertu.

Il s’entretenait avec Mme Rozel des vérités de notre culte. Il écoutait la lecture des Pères de l’Église et quand un jour, la mère du jeune missionnaire-soldat, lui dit : « Général, il faut causer à votre femme une grande joie : Il faut revenir près d’elle, catholique et croyant, » il répondit rêveur.

« Peut-être, avez-vous raison : là-bas, entre ma sœur et mes relations, je trouverai sans cesse ma nouvelle route barrée. Je ne pourrai, sans luttes pénibles, accomplir un acte, qu’au fond, depuis longtemps je désire. Si ma femme pouvait venir, je me déciderais. »

Sur ces entrefaites, une grande joie rayonna sur les deux armées : Un armistice