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unterden linden[1] ; les yeux à terre, des gens le croisaient, des saluts s’adressaient à lui, et il ne voyait rien. Plusieurs fois, il revint sur ses pas avec l’idée de rentrer au château, de remettre sa démission, et toujours quelque chose le retînt : l’instinct d’antan qui l’avait fait si enthousiaste des gloires allemandes, l’obsession aussi des reproches de sa sœur, l’accusant de tiédeur, à présent que le contact d’une Française l’avait amolli. Et il finit par enfiler la Fridrischstrasse, rentrer chez lui, mettre en ordre toutes choses en vue d’une longue absence, et préparer son départ pour le lendemain.

Il eut le soir une longue conversation avec le secrétaire particulier du grand chancelier, il en sortit résolu, il était soldat, Il obéissait. Sa conscience n’avait rien à voir avec sa consigne ; les hommes sont vraiment bien sots de s’inquiéter de choses qui n’arrivent jamais ! Peut-être sa mission aurait-elle un résultat, opposé à ses appréhensions ; la paix au lieu de la guerre.

Allons, en route ! Il faudrait dissimuler vis-à-vis de Michelle, lui faire croire qu’il allait au-devant d’elle à Paris et qu’il y séjournerait pour lui faire plaisir, lui montrer sa ville natale, dont elle ignorait toutes les attractions.

Le comte revêtit des vêtements civils et se rendit à la gare avec le calme du parti pris.

  1. Promenade publique, sous les tilleuls.