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fois elle obtenait qu’il assistât à l’office auprès d’elle, et alors il suivait les exercices avec une attitude grave et correcte ; mais tout à coup, il avait cessé de la suivre, morigéné, sans doute, par sa sœur qui l’avait contraint à venir avec elle au prêche dans le temple de Rantzein ; Edvig répétait à tout moment que les Hartfeld étaient évangélistes, qu’ils avaient jadis répandu leur sang pour la religion, au temps de Louis XIV, et qu’ils ne varieraient jamais dans leur foi. C’était bien assez qu’une alliance étrangère eût troublé l’harmonie de leur généalogie. Bref, Edvig était blessante pour Michelle. En cela comme en toute chose, Hans se taisait, et sa femme priait mentalement, réconfortée par sa paix intérieure, par la sensation constante de la protection divine étendue sur ses actes.


II


Revenons maintenant, après cette digression nécessaire, à notre jeune héroïne qui trottait toujours sous bois, sans en pouvoir sortir, le jour où elle s’était égarée pendant la chasse de Baumwald.

« C’est inouï, se disait-elle, la route était là pourtant ! »

La sueur coulait de son front, l’anxiété et la fatigue lui ôtaient ses forces. Elle s’arrêta pour s’orienter. Mais s’orienter dans une forêt n’est pas chose aisée, on ne voit que des morceaux de ciel, la place du soleil échappe à l’observation ; elle qui, sur mer, savait si bien se conduire, perdait ici toute notion. Elle écouta, aucun son de cor ne venait plus à elle, aucun aboi. Elle se souvint avoir entendu dire à son mari que la mousse des arbres était toujours tournée au nord, mais elle était dans une région de sapins où pas un lichen ne nuançait l’écorce.

Elle descendit de cheval, colla son oreille à terre. Rien. Des bruits de feuilles sèches