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Il y avait un an que la petite Mouette était entrée au château de Rantzein, après un délicieux voyage coupé d’arrêts fréquents dans les villes intéressantes que les jeunes époux avaient dû traverser. Ils avaient vu Paris d’abord, où Mme Carlet les avait accablés de témoignages de tendresse ; puis Strasbourg, puis Bade et enfin, un soir, dans la magnifique avenue de troënes qui longe la jolie rivière de Shwartzengraben, sur laquelle est situé le château ; Hans avait pressé la main de sa femme, en lui disant tout bas :

« Je t’en prie, mon enfant, si quelque chose te froisse dans l’attitude de ma sœur, supporte-le pour l’amour de moi. Elle s’est difficilement faite à l’idée de me voir mettre en mon cœur une autre affection que la sienne, peut-être sera-t-elle pour toi un peu froide au début, mais tu auras vite fait de la conquérir comme tous ceux que tu approches d’ailleurs.

— Je l’espère, mon ami, si elle vous aime, elle sera bonne pour moi.

— D’autant, reprit-il, enveloppant mal ses épines dans des roses, qu’elle te rendra d’immenses services. Tu ne sais pas, à ton âge, tenir une maison, diriger une troupe de serviteurs ; tu auras grand soin de ne pas la froisser, en ayant l’air d’agir sans son contrôle. Elle conduira la maison comme par le passé, et tu auras, toi, la tranquillité, la paix de l’inaction, aucun des ennuis extérieurs ne viendra te troubler dans l’existence heureuse que je rêve pour toi. »

Michelle devina à demi l’envers des choses, mais elle ne le laissa pas voir, ne voulant,