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me répondit pas aussi clairement que je l’aurois désiré. Je m’en allai en colère, en lui disant qu’il m’impatientoit à l’excès ; mais le mauvais plaisant me répliqua, s’il ne me falloit pas encore quelques gouttes d’opium pour me rendormir & faire de nouveaux songes. A ces mots je me réveille & je reste anéantie ; tout-à-coup j’entends un bruit épouvantable dans la rue. Je me lève & je vois le grand jour. Je cours vîte à ma croisée ; ô surprise moins flatteuse que celle de mes fictions ! c’est une bagarre effroyable dans ma rue, des tombereaux sont accrochés avec des fiacres, une bande de bœufs montant sur la roue des voitures, présentent leurs têtes énormes & meurtrières aux portières de ces tristes sapins, & font frémir ceux qui sont dedans. Des bandes de cochons & de moutons arrivent à grands pas ; & je reconnois que mon aimable songe n’est qu’une illusion trompeuse. Je l’ai sans doute étendu ; mais le fonds en est vrai : & comme il n’est pas