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amertume pour elle de ſouffrir dans ſa triſte & cruelle ſituation, ſous les yeux de cette ingrate famille ! Tout ce que j’avance eſt pour faire connaître que nous ne ſommes pas étrangers à la famille de Flaucourt, & que la mienne n’étoit pas de la lie du peuple pour retirer aucun tribut des ſecours qu’elle a donnés à la Maiſon de Flaucourt. Mais quand la mienne auroit été de pauvres mercenaires, la maiſon de Flaucourt ne ſeroit-elle pas redevable d’un ſalaire que la reconnoiſſance auroit dû, de leur part, faire répandre avec abondance ſur ma malheureuse mere, puisque la néceſſité la force à réclamer leurs bienfaits, qui, en les obtenant, ne ſeroient qu’un acquit de leur part. Leur ſeul prétexte, pour ne pas la ſecourir, ſeroit un beau motif qui décideroit tous ceux qui ont cette façon de penſer, propre à être regardés véritablemen pour des hommes. Je n’attends pas de libéralités de leur part, je n’exigeois pour ma mere qu’une penſion alimentaire de ſept à huit cens livres. Leur ingratitude atroce, & leur dureté inexprimable, ont pouſſé ma diſcrétion au-delà de toute réſerve : et ſi je suis fautive en les démaſquant, ma faute eſt bien excuſable. Quiconque ne seroit pas touché de mon récit, n’auroit pas reçu de la Nature un cœur ſenſible. Il ne peut y avoir que des ames