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ſeul que je pourrois épargner, par le mépris que j’en dois faire, eſt ce vil & rampant Lafontaine, dont les conseils aussi pernicieux que funeſtes, ont empoisonné le cœur d’un jeune homme, fait pour voler à la gloire. Ce jeune homme hélas ! eſt mon frère, devenu Marquis de Flaucourt, depuis la mort de mon trop malheureux pere. Je dois rougir ſans doute de l’erreur qui me donna le jour ; mais la Nature qui ne connoît ni loi, ni préjugé, ne perd jamais ſes droits dans une ame ſenſible. À peine le haſard me fit rencontrer ce frère dans le monde, que le vil ſéducteur qui s’est emparé de lui depuis quelques années, qui a ſubjugué ses goûts, ſa raiſon, me l’a enlevé. Je n’eſpérois qu’en lui, & je n’avois point à craindre qu’il eut étouffé dans ſon cœur le cri de la Nature & les liens du ſang. Je le laiſſe pour m’occuper de personnages plus eſſentiels, n’étant pas ſeul l’objet de mon Mémoire. Les années & les bons principes qu’il a reçus, peuvent me le ramener, & me donner des preuves de ſon amitié fraternelle.

Que la ſentence des Dieux & des hommes me juge dans la poſition affreuſe où je me trouve par l’injuſtice de ceux qui ont excité en moi la plainte, l’indignation & la révolte. Tous les faits que je vais avancer ſont autant de vérités