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car si nous étions parfaitement d’accord tous trois, l’univers n’auroit qu’un seul maître.

LE BON-SENS.

Vous parlez comme un jeune homme qui donne pour la première fois ses idées au Public.

L’ESPRIT.

C’en est trop, & pour vous punir l’un & l’autre de m’avoir excédé, lisez le premier volume de mes œuvres.

LE BON-SENS.

Miséricorde ! quelle pénitence ! il ne vous manquoit que ce travers ; augmentez le nombre des Auteurs qu’on ne lit jamais, la boutique des Epiciers, des Droguistes, des Bureaux de tabac, les Cabinets… Vous m’entendez bien ; voilà le fort de ceux qui ont la prévention, comme vous, de donner à un Public éclairé leurs œuvres obscures, leur théâtre qu’on ne joue nulle part ; qui se ruinent pour se faire imprimer sans enrichir aucune bibliothèque. Mettez, mon cher Esprit, toutes vos ressources à l’alambic, vous n’en tirerez que de l’eau claire.

L’ESPRIT.

Soit ; mais on ne pourra pas me dire que je n’ai pas trouvé en tout ce que je fais, de l’eau à boire.