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sont bientôt chez la divinité du dieu comique. On les trouve délicieux ; mais les fleurs vont se passer : quel dommage que leur durée soit si courte ! Tranquillisez-vous, souveraine de la pensée du héros de coulisse ; je suis votre pourvoyeuse : deux nouveaux orangers garnis de leurs boutons odorans se joignent aux premiers ; et le jasmin et la rose remplacent successivement les arbrisseaux dont les fleurs ont cédé au ravage du tems.

Mais l’hiver s’approche ; Flore s’enfuit. Jusques-là j’avois été délicieuse, divine : que faire pour soutenir ma brillante réputation ? Je briguai l’honneur d’être excellente. Flore me quitte, ayons recours à Comus. Je suis d’un canton de la France, où ce dieu des gourmands professa l’art d’apprêter les dindes aux truffes, les saucissons et les cuisses d’oie : n’en laissons pas manquer la table de mon protecteur. « Ah ! me dit-il en mettant un doigt mystérieux sur sa bouche, un jour qu’il dépeçoit une dinde, je vois ce qu’il faut que je fasse ; Madame de Gouge, je ne suis point un ingrat. — Bon, me disois-je, en tressaillant de joie sur mon fauteuil : voilà mon tour qui s’approche. »

On se lève de table, on passe au sallon. Molé fait remarquer aux convives l’élégance