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penser en regardant les morceaux de peinture, Willette, avant tout, veut penser et faire penser. Il est mélancolique le plus souvent, ironiquement triste ; mais parfois une gaieté bouffonne s’empare de lui, ou une verve satirique impitoyable, et alors c’est un maître de rire. Il s’appelle Will, comme Shakspeare.

Tiret-Bognet, Henry Somm, Uzès, Henri Rivière, puis bien plus tard Caran d’Ache et Steinlein furent les fournisseurs attitrés du Chat noir. Tiret-Bognet, un humanitaire, un salutiste, soldat de l’armée du salut, triste et doux ; Henry Somm, un japoniste parisiennant, spirituel et gai ; Uzès, satirique, enlevant alertement des silhouettes ; Henry Rivière, macabre, une sorte de Rollinat du crayon, qui jeta maint croque-mort en maint paysage neigeux ; Caran d’Ache, le dessinateur élégant, collet monté, et Steinlein, dessinateur d’oiseaux et de chats, qui trousse aussi les petites femmes.

Et bientôt, des parages de l’Odéon, les poètes et les musiciens prirent le chemin du Chat noir. Rollinat, Haraucourt, Lorin, Paul Marrot, Charles Cros, Félicien Champsaur, Armand Masson, Georges Fragerolle, Léo Montancey, etc., etc., etc.