Page:Goudeau — Dix ans de bohème, 1888.djvu/159

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pareilles à des fantômes de pénitentes, des strophes sortent et glissent en cadence ; ou bien c’est une envolée, un tourbillon d’orgie, des baisers que l’on dérobe et des coupes que l’on brise, tandis que les timbres divers de l’orchestre se répondent, frappant sur les accords ainsi que des pieds de ballerines sur un parquet élastique.

C’était, le dimanche, pour quinze sous, le paradis du concert Populaire. Il y fallait un costume ad hoc : un chapeau mou et des vestons résistants. Car on se battait souvent pour Wagner, en ce paradis, et plusieurs fois, sous une avalanche de siffleurs, l’applaudisseur dut rouler, la tête la première, sur la pente des gradins par-dessus les crânes des auditeurs. Tout n’était pas rose dans cette carrière musicale. Heureusement, la plupart du temps, nous, les applaudisseurs, nous nous groupions, et ma foi ! quelques siffleurs durent écoper.

La musique pour la musique ! Ah ! pourquoi Wagner a-t-il libellé des poèmes ! Pourquoi veut-on nous le faire applaudir comme librettiste ? Enfin la musique n’en existe pas moins, n’est-ce pas ? Mais je préfère les suggestions qu’elle m’offrait alors aux légendes qu’elle pré-