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Quoi de plus intimement navrant et doux que cette pièce : le Chat botté ?

Matou charmant des contes bleus,
Chat l’unique trésor des gueux,
Chat qu’on adore
En son enfance, et que, très vieux,
On aime encore
..........
Ah ! qu’il était, mon Chat botté,
Luisant d’amour et de gaîté,
Quand, chat d’audace,
Avec des airs exorbitants,
Il précédait mes beaux vingt ans,
En criant : « Place !
« Place au marquis de Carabas !
« Ohé ! vous tous, là-haut, là-bas,
« Place à mon maître !
« Admirez, peuples étonnés,
« L’homme depuis le bout du nez
« Jusqu’à la guêtre.
« Et d’abord proclamez, manants,
« Que les bois, les prés et les champs,
« Les fleurs nouvelles,
« Les cieux, à dater d’aujourd’hui,
« Sont à lui, les lauriers à lui,
« À lui, les belles !
« Si vous en doutiez par malheur !
« Vous seriez — j’en essuie un pleur,
« Lorsque j’y rêve —
« Ma parole de Chat botté,
« Hachés comme chair à pâté,
« Hachés sans trêve !… »