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Si en veillierent par maintes nuiz et par mainz jourz[1]. Lors prenoient a regarder les estoiles[2] qui se levoient vers oriant et s’esmouvoient[3] environ par desus leur teste[4].

Cil n’entendoient a mangier[5] ne a leur ventres emplir, comme font [Fo 13 a] les bestes qui ne quierent fors leur pasture, si comme font orendroit cil qui n’ont cure fors de vivre comme pourciaus et de couchier a aise[6] en leur mols liz[a] ; ainz veilloient par maintes nuiz, et ne lor annioit pas ; anz[7] leur embellissoit moult de ce qu’il veoient[8] le firmament si noblement mouvoir.

Et veoient les estoiles mouvoir jusqu’a[9] tant que eles se couchoient contre oriant par d’autre part[10][* 1] l’une [Fo 13 b] plus tost que l’autre. Ainsi regardoient en tour le firmament, jusques[11] au jour qu’il reveoient le souleill[12] lever au matin vermeill et cler[13] qui montoit la moitié du jour et en l’autre moitié descendoit, tant que il s’aprochoit du[14] couchier qui faisoit aprochier[15] la nuit. Et lors revenoient les estoiles[16] en leur deduit, tant que li souleulz[17] revenoit qui enluminoit tout le[18] jour, et [Fo 13 c] s’en aloit son droit chemin tant qu’il repairoit au matin arrieres.

Après regarderent de la lune qui estoit une commune chose et au monde apparoit diversement. L’une foiz estoit reonde, et l’autre demie, ausi[19] comme s’ele fust trenchie par mi le milieu. Et après devenoit cornue. Et ainsi s’en aloit toute defaillant[20], tant que l’en n’en veoit point. Après rapparoit[21] cornue, et puis demie, et puis toute [Fo 13 d] plainne, si comme ele estoit devant, et ausi[22] entiere.

Lors sorent il bien par leur sens qu’ele s’aprochoit[23] du souleill[24] jusques a tant qu’ele estoit endroit lui, et puis s’en departoit[25], et après s’en esloingnoit plus et plus, tant qu’ele[26] estoit ausi[27] ensus du souleill[28] comme ele avoit esté devant. Et lors s’an[29] raloit aprouchant. Puis s’en

  1. — B : jours.
  2. — B : resgarder les estoilles du ciel.
  3. — B : s’esmovoient.
  4. — B : testes.
  5. — B : mengier ; N : mangier.
  6. — A : « a » manque.
  7. — A : annoit ; B : leur annioit pas. Ainz... ; N : leur anuioit pas. Ainz.
  8. — A : noient.
  9. — B : estoilles mouvoir jusques a...
  10. — A, B, N : par d’autre part ; cf. aussi fo 100 a, c, 101 b.
  11. — B : dusques.
  12. — B : soleill.
  13. — B : cler et vermeill.
  14. — B : s’aprouchoit de.
  15. — B : aprouchier.
  16. — B : estoilles.
  17. — B : soullielz.
  18. — B : li.
  19. — B : aussi.
  20. — B : desfaillant.
  21. — B : reparoit.
  22. — A : ansi ; B : aussi.
  23. — B : s’aprouchoit.
  24. — B : soleill.
  25. — B : despartoit.
  26. — B : que ele.
  27. — B : aussi.
  28. — B : soleill.
  29. — B : s’en.
  1. * « Par d’autre part » se retrouve dans la plupart des mss. Il s’agit, semble-t-il, du vieil emploi de la préposition par jointe à certaines prépositions, surtout à celles qui commencent par de. Cf. par devers, par decosté, par dessous. « Par de treis parz les assaillirent — E par treis lieus les envaïrent. » Chron. des Ducs de Normandie (Paris, 1836). « Karles li rois de France, qi lor vient en aïe — S’est ambatuz an l’ost par de l’autre partie ». Chanson des Saxons (Paris, 1839, II 126).

    Par est aussi confirmé par la mesure des vers dans la première rédaction. Sloan, fo 81 d : Contre oriant par d’autre part. Cf. Burguy II 358.

  1. « Et quant... mois liz. » Sydrach Ad. 208. Neckam II 173 ; De Laudibus 10.