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xiii[a].
Comment la mer devient salée[b].

Or vous dirons ci après comment la mer devient salée, qui tant est amere que nus n’en puet[1] boivre[2].

Il avient par le souleill[3] d’en haut. Car il fait si [F° 84 a] trés grant chaut en aucun lieu que la mer i eschauffe[4] si durement que la terre, qui est desoz[5], atrait une moisteur amere qui li tolt[6] toute sa saveur. Car en la mer a moult de granz[7] montaingnes et de granz valées qui sont plainnes de granz amertumes. Et la terre qui est au[8] fonz escume pour le chaut du souleill[9] amont qui se melle avoec l’yaue parfont, si que il en trait sa saleüre amont par la grant chaleur du souleill[10], tant que ele[11] est [F° 84 b] mellée avoec l’autre[c]. Et ainsi devient la mer salée[12] avoec l’autre. Mais atant nous tairons des yaues. Si vous[13] dirons de l’air.

  1. [F° 83 d84 b = Vers 3726-3745.]
  2. Cette explication ne forme pas un chapitre séparé dans le ms. envers. Elle fait partie du chapitre précédent.
  3. « Il avient par le souleill... avoec l’autre. » V. Introduction p. 44, 45. Neckam II. 1. Honorius Aug. I. 45. Albert le Grand (Opera Omnia, Paris, 1890 t. 4) De Meteoris II. 3. 3. Bède, De nat. rer. 41 (Patrol. t. 90, col. 261). Sydrach Add. 133 ; S 130. Adélard de Bath. Quæst. 51 (Quare marina aqua salsa est). Sa théorie est la même que celle de Gossouin : i. e. la chaleur du soleil fait transpirer les montagnes au fond de la mer, et cette transpiration, mélangée à l’eau douce, produit l’eau salée. Adélard ajoute que l’eau de mer est plus salée en été qu’en hiver, la transpiration étant plus abondante à cause de la chaleur.
  1. — B : ne puet. « En » manque.
  2. — B : boire.
  3. — B : soleill.
  4. — B : la mer y eschaufe ; C : eschauffe ; A : eschausfe.
  5. — B : desouz.
  6. — B : qui lui toult.
  7. — B : a de moult granz.
  8. — B : as.
  9. — B : soleill.
  10. — B : soleill.
  11. — B : qu’ele
  12. — A : « et ainsi devient la mer salée » se trouve écrit deux fois.
  13. — A : Si vons.


xiv[a].
De l’air et de sa nature.

Li airs est assis desus l’yaue, et est plus soustis[1] que l’yaue ne que[2] la terre ; et avironne la terre entour, et se donne si haut comme la nue puet plus monter. Cil airs si est li airs[3] espés qui nous avironne[4] en touz sens. Et par lui[5] vivons au-[F° 84 c]tresi comme li poissons vit de l’yaue, qui enz la trait et puis la giete hors[6]. Tout autresi nous pourfite[7] li airs ; car nous espirons hors et enz ; et nous tient la vie dedenz le cors. Car li hons morroit[8] plus tost sanz air que ne feroit li poissons sanz yaue, a cui la vie est moult tost fenie quant il en est hors.

  1. — B : soutis.
  2. — B : « que » manque.
  3. — A : « si est li airs » manque.
  4. — B : environne.
  5. — B : li.
  6. — B : fors.
  7. — B : porfite.
  8. — B : moroit.
  1. [F° 84 b85 b = Vers 3746-3797.]