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breuse, hideuse et plainne de pueur et de douleur et d’angoisse et de tristece et de fain et de soif. Ne jamais nus ni avra leèce ne joie. Ce sont li jehenne[1] puant, une terre si ardant et si male que [F° 78 b] noustre feu[2] n’est que painture, envers celui, d’ardeur.

La sont li flueve[3] perilleus qui sont de feu et de glace, si hideus et si plains de venim[4] et d’ordes bestes, qui font si grant noise et si granz[5] molestes des ames qui la sont mises en cel abysme, que nus n’en diroit la milliesme partie.

En terre a moult d’autres lieus qui sont perilleus et orrible[6], que dedenz terre que en mer, et en maintes ylles qui par la mer sont, orribles de [F° 78 c] pueur et de feu et de soufre[7] ardant, qui moult sont penibles. Si y[8] a d’autres granz montaingnes de souffre[9] qui ardent nuit et jour, ou maintes ames ont grant encombrier et ardent touz jourz pour espurgier leur maus[10].

Si vous puet bien soutire[11] a tant a parler de ceste matire[12]. Car nus ne porroit[13] raconter le mal ne la paine[14] que mauvais homme receoit[15] quant il est partiz[16] de cest siecle. Car il va[17] touz jourz de mal en [F° 78 d] pis. Si nous en tairons ore atant que plus n’en dirons.
Et puis que nous avons devisé et descrit[18] l’un des elemenz, ce est[19] la terre, si dirons après du secont ; ce est l’yaue qui keurt[20] touz jourz. Et après si dirons de l’air, et puis del[21] feu, dont chacuns[22] a son lieu propre.

  1. — B : gehenne.
  2. — B : feus.
  3. — B : les flueves.
  4. — B : venin.
  5. — B : grant.
  6. — B : orribles.
  7. — B : suesfre.
  8. — B : « y » manque.
  9. — B : suesfre.
  10. — B : mauls.
  11. — B : soffire.
  12. — A : mat’e ; B : matiere. L’orthographe ordinaire de ce mot dans le manuscrit A est « matire » (f° 26 d, passim). Une seule fois nous trouvons « matere » (f° 34 a), et même ce cas est douteux, comme il s’agit aussi d’une abréviation. L’orthographe matere sans abréviation est toutefois confirmée deux fois p. 87.
  13. — B : ne vous porroit.
  14. — B : painne.
  15. — B : reçoit.
  16. — B : parti...
  17. — B : vait.
  18. — B : descript.
  19. — B : c’est.
  20. — b : c’est l’yaue qui court.
  21. — B : du.
  22. — B : chascun.


ix[a].
Comment l’yaue court par la terre.

L’yaue si est la mer parfonde qui tout le monde avironne. Et de[1] celui viennent les flueves qui keu-[F° 79 a]rent par la terre. Et vont tant leur cours qu’il revienent[2] arrieres en la mer, la dont il sont venu. Et ainsi s’en vait[3] la mer[4] adès tournoiant[5] et faisant son cours[6] en tele maniere que, tant comme l’yaue est plus legere[7] que la terre n’est, de tant se tient ele plus près de la[8] terre par desus. Ele depart et devise le pays et s’espant par toutes terres.

  1. — B : et puis de.
  2. — B : reviennent.
  3. — B : se vait.
  4. — B : « la mer » manque.
  5. — B : tourniant.
  6. — B : cors.
  7. — B : legiere.
  8. — B : « la » manque.
  1. [F° 78 d79 b = Vers 3482-3507.]