Page:Gossuin - L’Image du monde, édition Prior, 1913.djvu/147

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 139 —

sanz piler et sanz fondemant[1], seulement par sa nature. Et pour ce est fols[2] qui se merveille de chose que Diex face. Car nus n’a pooir de moustrer raison pour quoi[3] eles sont ou non. Car il n’est nulle[4] chose si petite dont l’en[5] puisse savoir la glose vraiment[6], comment ele est, fors tant comme il plaist a Nostre Seingneur.
[F° 76 a] Par clergie peut l’en bien savoir et entendre raison d’aucune chose ; et par nature, si que raisons[7] n’i set que reprendre, tant comme nus hons en puisse enquerre, qui oevre en terre par nature[* 1]. Mais nus si ne porroit savoir pour quoi[8] ne comment eles sont faites, et[9] ne porroit nus savoir certainement[10], fors Diex qui la raison en set et entent.

  1. — B : fondement.
  2. — B : fouls.
  3. — B : quoy.
  4. — B : nule.
  5. — B : petite de quoy l’en...
  6. — B : vraiement.
  7. — B : raison.
  8. — B : savoir du tout pour quoy.
  9. — B : ce.
  10. — B : certainement.
  1. * « Par clergie... terre par nature » : On peut comprendre et savoir la raison des choses par la science ; et (là où) l’on ne saurait en expliquer les raisons, quelles que soient les recherches de l’homme qui ne travaille sur cette terre qu’à l’aide de la nature, (on les comprend) par la nature.


viii[a].
Ou enfers siet et que ce est.[b]

Nous vous avons devisée la terre par dehors au mieulz[1] que [F° 76 b] nous poons. Or nous couvient[2] enquerre après quels lieus il a par dedenz la terre, se ce est[3] enfer ou paradis, et la quele chose vaut mieux[4] et la quele pis.

Cil lieus qui est enfermez en terre, je di que ce est[5] enfer. Car enfer ne porroit pas estre en l’air, n’en si noble lieu n’en ciel n’est il pas ; car trop est li lieus purs et nez. Et enfers[6] est laiz et oscurs, et plus pesant[7] que riens qui soit ; par quoi l’en puet bien entendre que il a fait son estre [F° 76 c] el plus bas lieu de la terre. Car en haut ne porroit il pas estre. Car il est contraires a paradis qui est el ciel lasus. Et pour ce s’est il trait ensus de lui, au plus qu’il peut[8]. Et est el milieu de la terre.

Je ne di pas qu’enfer ne soit aillieurs, quele part que ce soit. Car, après la mort, partout a painne et mal qui l’a deservi. Neïs s’il estoit mis desus le ciel, si avroit il enquore pis assez. Si comme il seroit d’aucun homme qui [F° 76 d] seroit en grant maladie, et se devroit mourir[9], et l’en le metoit en ·i· biau lieu, ou il eüst joie et soulaz ; tant seroit il plus tristres

  1. — B : miex.
  2. — A : couvient ; B : convient. Le scribe de A écrit « couivient », le point sous l’i dénotant la suppression de la lettre. C’est le signe employé par le copiste dans ce but. Cf. f° 89 a n.
  3. — B : ce cest est.
  4. — B : miex.
  5. — B : c’est.
  6. — B : enfer.
  7. — B : pesanz.
  8. — B : puet.
  9. — B : morir.
  1. [F° 76 A — 78 D = Vers 3349-3481.]
  2. Le chapitre sur l’enfer semble être l’ouvrage de Gossouin lui-même sans emploi direct de sources. Honorius Aug. (I. 37) lui a peut-être servi de base.