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QUATORZIÈME SIÈCLE

La haine de Jean pour Charles-le-Mauvais, depuis le meurtre du constable de la Cerda, s’était accrue en raison de l’opposition du roi de Navarre à la perception des derniers impôts. Informé que ce dernier était convié à la table du dauphin Charles, à Écouen, avec plusieurs autres seigneurs, Jean se rendit au festin, bien accompagné pénétra dans la salle où les convives étaient réunis et donna l’ordre de saisir le roi de Navarre. Malgré les supplications de son fils qui le conjurait de ne pas le déshonorer, Jean frappa lui-même de sa masse d’armes le comte d’Harcourt, qu’il fit enlever par ses soldats, en compagnie de trois autres seigneurs. Quant à Charles de Navarre il fut jeté en prison. Ces exécutions sommaires excitèrent une indignation légitime chez les parents des victimes et valurent de nouveaux alliés au roi d’Angleterre.

Le prince de Galles, appelé le Prince noir, à cause de la couleur de son armure, partit de Bordeaux avec deux mille hommes d’armes et six mille archers, et porta le ravage dans les riches provinces du Quercy, du Limousin, de l’Auvergne, du Berry jusqu’à Tours. Le roi de France quitte aussitôt la Normandie où un corps Anglais tentait une diversion, et se dirige sur le Poitou, afin de couper la retraite à l’ennemi. Le prince Noir manquant de vivres, n’ayant qu’un nombre de troupes trois fois moindre, offrit d’abandonner ses conquêtes, son butin, ses captifs et de ne point porter les armes contre son suzerain pendant sept ans. On lui demanda de se constituer prisonnier de guerre avec cent de ses chevaliers. Cette proposition rendit la bataille inévitable. Les Anglais réduits à huit mille combattants, se fortifièrent sur le plateau de Maupertuis, à quelques lieues de Poitiers ; la disette régnait dans leur camp, et il eut suffi de ne point les attaquer pour les vaincre par la famine. Jean qui commandait à soixante mille hommes, certain de la victoire, voulut combattre.

Il commença l’attaque en lançant un corps de trois cents cavaliers qui durent battre en retraite sous une grêle de flèches. Ce mouvement en arrière suffit pour