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TREIZIÈME SIÈCLE

par les Bolonais, l’Empereur se sentit accablé (1249). La trahison de Pierre des Vignes, qui « tenait, selon le Dante, les deux clefs du cœur de Frédéric, pour le fermer et pour l’ouvrir, » acheva de le désespérer. Innocent IV, avec lequel il essaya de se réconcilier, se montra intraitable, malgré la médiation de Saint-Louis ; le Saint-Siége, implacable dans sa haine contre les Hohenstaufen, avait juré d’écraser « cette race de vipères. » Frédéric II, épuisé par tant d’efforts inutiles, alla mourir à Fiorentino, dans la Capitanate, entre les bras de son fils naturel, Manfred (1250).

La période de vingt-trois ans, appelée le grand interrègne (1250-1273), jeta l’Allemagne dans un tel état d’anarchie que le pouvoir impérial cessa d’exister en réalité et se fractionna à l’infini au profit des princes, des seigneurs et des villes. Konrad IV prit cependant le titre d’Empereur malgré les anathèmes d’Innocent IV, revenu à Rome grâce au triomphe des Guelfes d’Italie sur les Gibelins. La guerre se poursuivit entre le fils de Frédéric et le pape, et ne fut suspendue que par la mort de l’un et de l’autre, en 1254, bientôt suivie de celle de Guillaume de Hollande, compétiteur de Konrad (1256). La maison de Souabe ne fut plus représentée que par un enfant de deux ans, nommé Konradin, et par le vaillant Manfred qui se fit couronner roi de Sicile, malgré le pape Alexandre IV (1258).

Quant au trône d’Allemagne, il fut mis aux enchères publiques, et les quatre grands électeurs du Rhin le vendirent en même temps à Richard de Cornouailles, second fils de Jean-sans-Terre, et au roi de Castille, Alphonse X. Ce dernier ne vint jamais en Germanie ; Richard s’y montra plusieurs fois et reçut toujours de ses partisans un accueil dont l’enthousiasme était proportionné aux sommes d’argent qu’il apportait. Il mourut dans ses domaines d’Angleterre en 1271.

Pendant ce long interrègne, l’Allemagne prit véritablement le caractère d’une confédération dont l’Empereur n’était que le président. Le partage du domaine impérial entre les grands vassaux et le démembrement