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HISTOIRE DU MOYEN-ÂGE

sa couronne. Le pape adouci prit la défense de l’excommunié, donna ordre à Philippe de renoncer à son expédition et d’utiliser ses préparatifs contre le comté de Flandre.

L’entreprise fort lucrative n’était pas sans difficultés ; la Flandre renfermait une population active et nombreuse enrichie par le commerce et l’industrie. Les villes avaient su conquérir des privilèges qui leur assuraient une sorte d’administration républicaine, et, plus d’une fois, elles avaient réprimé les tentatives de leurs seigneurs ou de leur comte.

Philippe prépara son attaque par terre et par mer, débarqua lui-même à Dam et compensa la perte de sa flotte que les Anglais incendièrent, par de fortes rançons imposées aux cités de Bruges, d’Ypres, de Gand, d’Oudenarde, de Courtray et de Gassel.

Un danger redoutable arrêta ses progrès. Une puissante coalition s’était formée pour envahir le royaume au nord et à l’ouest. L’empereur Otton IV, le comte Ferrand de Flandre, les ducs de Limbourg et de Brabant, les comtes de Boulogne et de Salisbury, beaucoup d’autres seigneurs des Pays-Bas et d’Allemagne, concentrèrent leurs forces dans le Hainaut, non loin de Valenciennes, pendant que Jean-sans-Terre, soutenu par les grands d’Aquitaine, opérait sur la Loire et occupait Angers.

Le fils du roi, Louis-le-Lion, arrêta promptement les progrès de l’Anglais, le battit à La Roche-aux-Moines et l’obligea à se retirer sur les côtes de l’Océan. Philippe Auguste marcha contre les coalisés du Nord avec ses chevaliers et les milices de quinze communes. L’action s’engagea le 27 juillet 1214, près du pont de Bouvines, sur la Marck, entre Lille et Tournay. L’armée des confédérés s’élevait à cent mille hommes ; celle de France n’en comptait pas cinquante mille. Les souverains, les princes, les chevaliers, les soldats des communes combattirent avec intrépidité, et Philippe Auguste remporta une éclatante victoire ; à Bouvines la dynastie capétienne reçut son baptême de gloire le jour même où la nationalité française prenait conscience d’elle-même