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HISTOIRE DU MOYEN-ÂGE

traînait une vieillesse prématurée. Peu après avoir présidé au couronnement de son fils dans une assemblée tenue à Paris, il se rendit en Angleterre pour demander sur le tombeau de Becket la guérison de Philippe, alors malade : il y fut atteint d’une attaque de paralysie qui le conduisit au tombeau (1180).

Les rares bienfaits de ce règne sont dus à l’abbé de Saint-Denis, Suger, qui fut tour à tour l’ami et le conseiller de Louis le Gros, et le ministre tout-puissant de l’indolent Louis VII. Pendant la seconde croisade, Suger, véritable vice-roi, fit respecter le pouvoir central, administra sévèrement les revenus du domaine, maintint énergiquement l’ordre public, et mérita par sa sagesse le surnom de Salomon du siècle, par ses services, celui de Père de la Patrie. Rentré dans la solitude de son abbaye, qu’il gouvernait depuis 1121 et où il commença peut-être la rédaction des grandes chroniques de Saint-Denis, Suger, comme saint Bernard, déplora la triste issue de la deuxième croisade, gémit sur les malheurs de la Terre-Sainte, et songea même à prendre le commandement d’une nouvelle expédition : la mort surprit l’ardent vieillard au milieu de ces nobles préoccupations (1152). On peut, avec le président Hénault, lui appliquer le mot de Tibère sur Curtius Rufus : Mihi videtur ex se natus.

Philippe II, que l’histoire a surnommé Philippe-Auguste, avait à peine quinze ans quand il succéda à son père. Son règne vit commencer la véritable monarchie française. Par son mariage avec la nièce du comte de Flandre, Philippe acquit le Vermandois, l’Amiénois, le Valois, dépouilla sa mère de ses châteaux, et, grâce à l’appui du roi d’Angleterre, réduisit à l’impuissance ses oncles et ses ennemis. En prenant possession du comté d’Amiens, il répondit à l’évêque, qui en était suzerain et qui réclamait l’hommage du nouveau titulaire : « Le roi de France ne rend hommage à personne (1185). »

Tels furent les premiers actes de ce prince, habile, entreprenant, peu scrupuleux sur le choix des moyens, plus pacifique que guerrier, que Guillaume le Breton, auteur d’une Philippide, calquée sur l’Énéide, et les ro-