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DOUZIÈME SIÈCLE

convaincues de la stérilité de toute revendication équitable, recoururent à la lutte armée. Il en résulta une foule de petites guerres à la suite desquelles les cités victorieuses obtinrent des traités qui, sous le nom de chartes de commune, consacrèrent leur affranchissement municipal et leur conférèrent la juridiction, ou droit de rendre la justice, que ne possédaient pas les bourgeoisies. Ces priviléges, obtenus par la conquête, eurent en général plus d’étendue et d’efficacité que ceux qui étaient acquis pacifiquement. Ce fut donc l’insurrection des opprimés contre les forts, des villes contre leurs seigneurs, comtes ou évêques, qui amena l’établissement des communes proprement dites. Les victoires populaires dotèrent ces communes d’une sorte de souveraineté intra muros, par laquelle étaient garantis les personnes et les biens, sous la surveillance de magistrats choisis par les habitants et nommés maires, jurés, échevins, etc.

La première croisade exerça une influence considérable sur ce mouvement d’émancipation dont l’énergie triompha presque partout des résistances féodales. Les dépenses qu’exigeaient ces lointaines expéditions déterminèrent les barons, qui partaient suivis d’une multitude de chevaliers, à vendre pour de l’or des droits qu’ils avaient usurpés. Les citoyens profitèrent de l’absence des oppresseurs pour cimenter leur union ; mais ils ne réussirent pas toujours et furent obligés souvent, après avoir acheté leurs franchises, de recourir aux armes pour les conserver.

La plus longue et la plus dramatique de ces luttes fut celle qui éclata à Laon en 1106. Cette ville, théâtre de brigandages incessants, accablée d’impôts et d’exactions dont l’évêque suzerain partageait le produit avec les nobles ou les religieux, avait acheté le droit de se régir par une charte communale. L’évêque voulut reprendre le privilége vendu, dès qu’il en eut touché le prix. Les bourgeois se révoltèrent, tuèrent l’évêque et les gentilshommes de son parti. Le roi de France, Louis VI, qui avait succédé à son père Philippe Ier en 1108, intervint