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HISTOIRE DU MOYEN-ÂGE

lui concéder un vaste territoire au centre duquel il éleva la ville de Maroc. Le cousin d’Abou-Beckr, Youzef-ben-Taschfyn, recula ses frontières, accrut son armée et conquit tous les États voisins. Sa domination s’étendait sur les villes de Fez, Tanger, Ceuta, Tuniz, Alger et sur tous les territoires africains compris entre la côte de Nigritie et l’ancienne Carthage, lorsqu’il reçut l’appel de ses frères d’Espagne. Il partit avec une nombreuse armée d’Almorravides, de Berbères et de nègres, franchit le détroit, marcha vers Séville et rencontra Alphonse VI dans la plaine de Zalaca, près de Badajoz, où les chrétiens furent écrasés (1086). Dans une dernière expédition, appelé par Aben-Abed, émyr de Séville, Yousef pénétra au sein de la Péninsule, non plus en allié, mais en maître. Il s’empara de Grenade, de Séville et de toute l’Espagne musulmane, après avoir battu les troupes arabes des émyrs ainsi qu’une armée espagnole (1091), commandée par Ruy Diaz de Vivar, dit le Cid (Syd, seigneur) surnom que lui avaient donné les musulmans à la solde desquels il avait fait ses premières armes en combattant les chrétiens d’Aragon.

Après sa défaite, Ruy ou Rodrigue Diaz de Vivar, qui s’était retiré avec ses Campeadores, dans un château-fort nommé la Pena del Cid (la roche du Cid), revint assiéger Valence que défendait le vieux cadi Ahhmed avec une faible garnison d’Almorravides. Le cadi dut capituler, mais à des conditions si avantageuses qu’elles stipulaient le maintien de sa fonction dans la cité. Cependant, dès qu’il eut pris possession de la ville, le Cid livra à la torture ce malheureux vieillard soupçonné d’avoir caché de prétendus trésors et, n’en obtenant pas de révélations, le fit brûler en place publique. Ce héros de légende, qui ne fut en réalité qu’un guerrier sauvage, cupide, vindicatif et déloyal, mourut à Valence en 1099, ayant promené dans tous les camps sa valeur vénale. Les Espagnols, à peu près refoulés jusqu’aux frontières de Castille, en 1093, ne perdirent point courage et se préparèrent à recommencer la lutte. Vers cette époque, un arrière petit-fils du Capétien Robert de France,