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ONZIÈME SIÈCLE

apparaît une grande cuve pleine d’ossements et de reliques de saints. À cette vue, Harold pâlit, comprenant la gravité du serment. Il partit enfin comblé de présents par le Normand, qui garda toutefois l’un des otages.

À peine était-il de retour dans son pays, que le vieil Edward, malade depuis longtemps, expira le 5 janvier 1066. Le lendemain, le comte Harold fut couronné roi dans l’église de Saint-Paul par Aldred, archevêque d’York. Sa popularité le désignait si naturellement aux suffrages de la nation, que personne n’acclama le nom d’Edgar, petit-fils d’Edmund Côte-de-fer, seul héritier légitime du trône.

Instruit de l’événement, le duc de Normandie somma le Saxon de tenir ses promesses « faites sur de bons et saints reliquaires. » Harold ayant répliqué que des serments arrachés par la violence ne pouvaient l’engager, Guillaume le fit déclarer parjure et sacrilège par la cour de Rome. Investi du royaume d’Angleterre par le Saint-Siége qui lui envoya une bannière bénite, le Bâtard ordonna dans ses domaines une levée générale, et, suivi par une foule d’aventuriers accourus de toutes les parties de la Gaule, il débarqua sur la côte de Sussex, près de Hastings, avec une armée de soixante mille hommes, le 28 septembre 1066.

Trois jours auparavant, Harold avait remporté une grande victoire, près d’York, sur des bandes norwégiennes conduites par son frère Tostig. Blessé dans ce combat, le roi saxon se reposait de ses fatigues lorsqu’il apprit le débarquement des Normands. Il se mit en marche aussitôt, et, sans attendre l’arrivée des milices du nord, alla camper sur les hauteurs d’Hastings avec des forces quatre fois moindres que celles de l’ennemi. Ses capitaines lui conseillaient de revenir sur Londres en ravageant tout le pays pour affamer les envahisseurs ; le royal chef déclara que, malgré l’infériorité du nombre, il aimait mieux courir les chances de la lutte que de miner les populations confiées à sa garde. Il se fortifia sur les collines avec des palissades de grands pieux. Ainsi retranchés, les Anglo-Saxons passèrent la nuit à chanter