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DIXIÈME SIÈCLE

(1000). Ainsi mourut Al-Manssoûr, qui dédaigna le trône et que cinquante victoires ne purent consoler d’une défaite.

Tandis que la civilisation arabe brillait d’un si vif éclat en Espagne, une affreuse anarchie, conséquence du démembrement féodal, désolait la Germanie, la Gaule, l’Italie. Les germes de renaissance, légués par Karl-le-Grand, avaient été étouffés sous l’avalanche des invasions normandes et hongroises. Le torrent de la barbarie avait effacé jusqu’aux traces des écoles. À peine subsistait-il quelques manuscrits soustraits au pillage et à la destruction, et enfouis au fond de monastères isolés. La guerre étant partout, le sol se couvrit de châteaux forts ; les villes, les bourgs, les couvents se fortifièrent aussi ; la lutte éclatant parfois dans l’intérieur même des cités, chaque rue finit par avoir ses retranchements, chaque maison sa tour et ses meurtrières. L’hérédité des bénéfices et des offices affranchit les maîtres de ces châteaux de toute dépendance, et par la réunion dans les mêmes mains de la souveraineté et de la propriété constitua essentiellement la féodalité.

Dans ces temps d’invasions continuelles, les petits possesseurs n’étant plus protégés par la loi, donnèrent leur champ à ceux qui pouvaient les défendre et en devinrent les fermiers ; les seigneurs rétrocédaient ces immeubles, sous la condition du service militaire, soit aux anciens propriétaires, soit à leurs fidèles et s’engageaient à venir en aide à ces sujets volontaires. Ainsi s’établirent le vasselage et la seigneurie, c’est-à-dire la relation entre le fief inférieur et le fief supérieur. Tout possesseur de terre qui voulait devenir vassal d’un seigneur, était soumis à la cérémonie de l’hommage. Tête nue, sans épée, sans éperon, à genoux, les mains dans les mains de son futur suzerain, qui restait assis et couvert, il lui disait : « Je deviens votre homme de ce jour en avant, de vie, de membre, de terrestre honneur, et à vous serai féal et loyal. » Après l’hommage venait le serment de fidélité ou de foi, acte bien