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CINQUIÈME SIÈCLE

décroissance de la production. Les petits propriétaires des campagnes, ruinés par les guerres incessantes ou dépouillés par les grands, étaient contraints de se faire colons du riche, se trouvaient enchaînés à la terre et perdaient, sinon le titre, du moins les droits de l’homme libre. Cet abaissement moral et matériel inspira le dégoût du travail, et la population diminua dans de telles proportions qu’il fallut repeupler des provinces désertes avec des colonies de Barbares.

C’est ainsi que les progrès du despotisme impérial eurent bientôt détruit les dernières institutions libres qui subsistaient dans le régime municipal. À l’image de Rome, chaque ville, en effet, possédait une sorte de sénat, nommé Curie, composé de propriétaires ayant au moins vingt-cinq arpents. Ceux-ci se nommaient Curiales. C’était parmi eux qu’on choisissait les Décurions, ou membres spéciaux de la Curie. À leur tête se trouvaient les Duumvirs, dont l’autorité n’était qu’annuelle et dont les attributions consistaient dans la présidence du conseil, l’administration générale des affaires de la cité, le maintien de l’ordre, etc. Mais quand, pour satisfaire les besoins d’un luxe insatiable et pour acheter la fidélité toujours douteuse des armées, les Empereurs furent obligés de multiplier les impôts, la situation des Curiales devint intolérable. C’étaient eux qui, en qualité d’administrateurs des revenus et des intérêts des municipes, percevaient les impôts publics sous la responsabilité de leurs biens propres. Or, la contribution foncière, de plus en plus lourde, ayant entraîné l’abandon d’une grande partie des terres, le fisc prit le parti de reporter sur les champs fertiles la taxe des champs non cultivés. Dès lors, les Curiales, certains de la ruine, tentèrent par tous les moyens de se soustraire à leurs fonctions, soit en s’incorporant dans le clergé, dans l’armée, soit en s’expatriant chez les Barbares. De son côté, peu disposé à se passer de ses contribuables et des garants de ses revenus, l’État prit pour les retenir les mesures les plus oppressives. On alla jusqu’à punir de mort celui qui donnait asile à un membre de la Curie se dérobant