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Loin d’entrer en lutte avec la politique, le christianisme évangélique, autrement dit le protestantisme, nous semblerait bien plutôt tenté de contracter alliance avec elle. Nous le disons nettement : s’il succombait jamais à cette tentation, il courrait les plus graves périls : toute puissance morale se diminue, risque même de se ruiner entièrement, quand, faisant prévaloir le point de vue utilitaire sur celui des principes, elle cherche sa force dans une alliance avec une puissance matérielle quelconque.

L’action du christianisme sur la vie des peuples et sur la marche de la civilisation, à tous les points de vue, mais surtout au point de vue moral, social et politique, est un des faits historiques les mieux établis. Ce fait, d’ailleurs si facile à expliquer, ne devait pas échapper aux hommes politiques dévoués aux idées de progrès et de liberté, et pourvu qu’ils ne fussent pas aveuglés par des préjugés anti-religieux, devait les amener nécessairement à cette pensée qu’ils pourraient bien faire servir au triomphe des idées qui leur étaient chères un instrument qui semblait y être si merveilleusement approprié, d’autant plus qu’ils pouvaient du même coup susciter une redoutable concurrence à une puissance politico-religieuse dont l’opposition tenace mettait en péril l’ordre politique à l’établissement et à la défense duquel ils s’étaient dévoués.

Cette idée de faire du christianisme évangélique un instrument politique et une arme de combat, se fit jour, il y a quelques années, et fit très rapidement son chemin dans une société religieuse où l’on s’engoue beaucoup trop facilement de toute idée prétendue nouvelle. Elle trouva son expression la plus complète dans une brochure très remarquable intitulée : « La question religieuse et la