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peut nous fournir des moyens de résoudre la seconde. Eh ! nous consentirions volontiers à reconnaître qu’il a été pyrrhonien et tout ce qu’on voudrait de plus ou de pire, car nous ne nous payons pas de mots, s’il nous était démontré, et si nous pouvions démontrer, que son point de vue philosophique, de quelque nom qu’on le qualifie, loin de l’empêcher de conclure très légitimement à la vérité du christianisme, ne peut au contraire que rendre cette conclusion plus logique et plus nécessaire. Car si le pyrrhonisme est un chemin qu’il faille nécessairement traverser pour arriver à la vérité, pourquoi ne le traverserait— on pas bravement ?

Qu’est-ce que le pyrrhonisme ?

Cousin l’a défini : « C’est une opinion philosophique qui consiste à rejeter toute philosophie comme impossible sur ce fondement que l’homme est incapable d’arriver à la vérité. »[1].

Mais Cousin ne nous dit pas sur quel fondement l’école sceptique afhrme que Thomme ne peut pas arriver à la vérité. N’est-ce pas, d’après elle, qu’il n’y a pas de vérité objective, ou, ce qui revient au même, quand il s’agit de spéculation philosophique, qu’on ne peut absolument pas affnmer qu’il y a une vérité objective ? Le pyrrhonisme a beau rejeter toute philosophie, ou toutes les phiiosophies, les détruisant les unes par les autres, il n’en subsiste pas moins lui-même, après son travail de dissolution, comme une philosophie et comme une philosophie très dogmatique dans son domaine propre et. exclusif. Dans ce domaine, qui est le moi, il est tout à fait affirmatif : il voit, il constate, il affirme des phénomènes de conscience,

  1. Du scepticisme de Pascal. Revue des Deux-Mondes, 15 décembre 1844.