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PREMIÈRE PARTIE
ANALYSE DES PENSÉES

CHAPITRE PREMIER
L’Homme naturel. — Ses misères ; Son éloignement de Dieu ; Son incapacité de connaître et d’être heureux. — Ses grandeurs ; La dignité de la pensée ; Besoins et aspirations ; Vestiges d’une nature originelle ; Contradictions.

Pascal, comme on sait, professait pour tous les systèmes philosophiques un égal et souverain dédain. Cependant, comme dialecticien tout au moins, il est lui-même philosophe, et c’est à l’école de Socrate et de Platon qu’il nous semble se rattacher le plus directement. Il fait de la connaissance de soi-même le principe de toutes les connaissances ; en conséquence, il met à la base de son système apologétique une étude approfondie de la nature humaine et pose dès l’entrée la grande question si essentielle en apologie comme en philosophie : Qu’est-ce que l’homme ?

L’homme, d’après Pascal, n’est pas une essence pure et ne se connaît pas comme essence pure. Il se connaît comme corps et comme esprit, et en même temps qu’il se connaît dans cette double capacité, il connaît qu’il relève de deux ordres extérieurs à lui, de l’ordre des corps par son corps, de l’ordre des esprits par son esprit. La conscience immédiate, intuitive de son essence lui fournit immédiatement la conscience du monde externe