tions et ces réponses convenues la faisaient sourire ; elle pensait :
« Ce sont encore des enfants ! »
Au mur, une lampe brillait, éclairant les sombres taches de moisissure, les images découpées dans des journaux ; sur le sol traînaient des seaux bosselés, des débris de zinc ; par la fenêtre, on apercevait au ciel obscur une grande étoile scintillante. Une odeur de rouille, de couleur à l’huile et d’humidité remplissait la pièce.
Ignati était revêtu d’un épais pardessus en drap velu qui lui plaisait beaucoup ; la mère le voyait caresser avec amour sa manche ; il tordait avec effort son gros cou pour mieux s’admirer. Et une pensée martelait le cœur de Pélaguée.
« Enfants !… mes chers enfants !… »
— Voilà ! dit Ignati en se levant. Donc, rappelez-vous ! d’abord chez Mouratov, demander le grand-père…
— Je me rappelle ! répondit Vessoftchikov.
Mais Ignati n’avait pas l’air de le croire, il lui répéta encore tous les signaux, et les mots de passe ; enfin, il lui tendit la main.
— Maintenant, c’est tout ! Adieu, camarade ! Saluez-les de ma part ! Dites-leur : — Ignati est vivant et bien portant. Ce sont de braves gens, vous verrez…
Il se contempla d’un air satisfait, passa la main sur son pardessus et demanda à la mère :
— Puis-je partir ?
— Tu trouveras le chemin ?
— Bien sûr !… Au revoir, camarades !
Il s’en alla, les épaules hautes, bombant la poitrine, son chapeau neuf sur l’oreille, les mains enfoncées dans ses poches. Sur son front et ses tempes, des bouclettes claires et enfantines tremblaient gaiement.
— Enfin, j’ai aussi de l’ouvrage ! dit Vessoftchikov en s’approchant de la mère. Je m’ennuyais… je me demandais pourquoi j’étais sorti de prison… Je ne fais que me cacher… En prison, j’apprenais… Pavel nous remplissait le cerveau que c’était un plaisir ! Et André nous dégourdissait aussi… Eh bien, mère, qu’a-t-on décidé de l’évasion, l’organise-t-on ?
— Je le saurai après-demain ! répondit-elle, et elle répéta en soupirant sans le vouloir :