Sophie, assise à côté d’elle observait toujours ses lecteurs ; elle chassait avec sollicitude les bourdons ou les guêpes qui venaient voltiger autour du visage de la mère. Pélaguée s’en rendait compte, les yeux mi-clos, et ces attentions lui étaient douces.
Rybine s’approcha et demanda :
— Elle dort ?
— Oui !
Il se tut un instant, braqua ses yeux sur le visage calme de la dormeuse, soupira et reprit à voix basse :
— C’est peut-être la première femme qui ait suivi son fils sur cette voie-là… la première !
— Allons-nous-en !… ne la dérangeons pas ! proposa Sophie.
— Il faut que nous allions au travail… J’aimerais bien pouvoir causer avec vous… mais il faut attendre jusqu’au soir ! Allons, camarades !
Les trois hommes sortirent, laissant Sophie dans la hutte. La mère pensa :
— Dieu merci ! ils se sont réconciliés !… Ils s’accordent !… Et elle s’endormit paisiblement, respirant l’air embaumé de la forêt.
VI
À la tombée de la nuit, les quatre ouvriers rentrèrent, heureux que la journée fût finie. Réveillée par le bruit des voix, la mère, toute souriante, sortit de la hutte, en bâillant.
— Vous avez travaillé et moi j’ai dormi comme une grande dame ! dit-elle en fixant ses yeux affectueux sur chacun d’eux.
— Cela ne fait rien, on te pardonne ! dit Rybine.
Il était plus tranquille qu’au dîner ; la fatigue avait dissipé l’excès de son agitation.
— Ignati ! fit-il, occupe-toi du souper… Nous faisons le ménage à tour de rôle… aujourd’hui, c’est Ignati qui doit nous donner à manger et à boire… Voilà !
— J’aurais volontiers cédé mon tour à quelqu’un d’autre, aujourd’hui, observa Ignati, et, tout en prêtant