casquette rabattue sur ses sourcils et couvert de boue jusqu’aux genoux :
— En passant, j’ai vu que vous aviez de la lumière et je suis entré pour vous saluer. Je sors de prison à l’instant ! expliqua-t-il d’une voix bizarre ; puis, s’emparant de la main de la mère, il la secoua avec vigueur et dit :
— Pavel vous envoie ses amitiés…
Et se laissant tomber sur une chaise avec hésitation, il fouilla la chambre de son regard maussade et soupçonneux.
Il déplaisait à la mère ; il y avait dans sa tête anguleuse et tondue et dans ses petits yeux, quelque chose qui effrayait toujours la vieille femme ; mais elle fut cependant contente de le revoir et elle lui dit, souriante et affectueuse :
— Tu as bien maigri !… André ! Faisons-lui du thé !
— Je prépare déjà le samovar ! répondit de la cuisine le Petit-Russien.
— Eh bien, comment va Pavel ? En a-t-on libéré d’autres que toi ?
Vessoftchikov répondit en baissant la tête :
— Pavel est encore en prison… il prend son mal en patience. On n’a relâché que moi.
Il leva les yeux, regarda la mère et continua lentement, les dents serrées :
— Je leur ai dit : Laissez-moi aller, j’en ai assez… Sinon, je tue n’importe qui et je me suicide ensuite. Ils m’ont libéré… Et ils ont bien fait… J’aurais tenu parole…
— Oui !… dit la mère en s’éloignant de lui ; ses yeux papillotaient involontairement quand ils rencontraient le regard aigu du grêlé.
— Et comment va Fédia Mazine ? cria de la cuisine le Petit-Russien. Il écrit toujours des poésies ?
— Oui ! Je n’y comprends rien ! dit le jeune homme en hochant la tête. Est-ce que c’est un pinson ? On le met en cage… et il chante… Il y a une chose que je sais : je n’ai pas envie d’aller à la maison…
— En effet, qu’y trouverais-tu ? répondit la mère en réfléchissant. Elle est vide, le poêle n’est pas allumé, il doit y faire froid…
Vessoftchikov se tut, ferma à demi les yeux, puis,