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CONTES D’ITALIE

aime, les vents sont favorables. Il est facile de franchir les fleuves quand on est née et qu’on a grandi au bord de la mer. Les montagnes ? Je ne me suis pas aperçue qu’il y en avait…

Alors Kermani, l’ivrogne, dit :

— Quand on aime, les montagnes se transforment en plaines…

— J’ai traversé des forêts en grand nombre ! J’ai rencontré des ours, des sangliers, des loups-cerviers et des taureaux terribles dont la tête était penchée vers le sol ; par deux fois, des panthères m’ont guettée de leurs yeux pareils aux tiens. Mais toute bête a un cœur ; j’ai parlé avec ces fauves comme je parle avec toi ; ils comprirent que je suis une mère et ils s’éloignèrent en soupirant. Ils avaient pitié de moi ! Ne sais-tu donc pas que les fauves, eux aussi, aiment leurs petits et savent lutter pour les défendre et les garder aussi bien que font les hommes ?

— Oui, femme ! dit Timour. Et souvent, je le sais, ils aiment plus fort et luttent plus opiniâtrement que les hommes !