Page:Gorki - Contes d Italie.djvu/29

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
21
À GÊNES

Partout on ne voit que des visages rayonnants, une animation joyeuse, de bons yeux humides ; de-ci, de-là, les enfants des grévistes mangent déjà du pain.

— On ne pensait pas à cela à notre époque ! dit un vieillard au nez crochu, qui tient un cigare noir entre les dents.

— C’est pourtant si simple !

— Oui ! C’est simple et intelligent !

Le vieux retire son cigare de la bouche, en examine le bout et secoue la cendre avec un soupir. Puis, apercevant à côté de lui deux gamins de Parme, des frères, on le voit, qui le regardent avec gravité, il prend un air rébarbatif, se hérisse, enfonce son chapeau sur ses yeux et ouvre les bras tout grands ; les enfants se serrent l’un contre l’autre, se renfrognent et reculent. Mais le vieillard s’accroupit soudain et se met à imiter avec beaucoup d’habileté le chant du coq. Les petits rient en trépignant de leurs talons nus sur les pavés ; le vieux se lève, rajuste son chapeau ; il se dit qu’il a fait tout ce qu’il fallait faire et s’en va en chancelant sur ses jambes affaiblies.