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LA MÈRE DU MONSTRE

frisés en petites boucles comme ceux d’un nègre.

Tenant dans sa main courte et menue, telle une patte de lézard, un morceau d’un comestible quelconque, le monstre penchait la tête avec les gestes d’un oiseau de proie, déchiquetait l’aliment avec ses dents, mâchait avec bruit et reniflait. Quand il était repu et qu’il regardait les gens, il découvrait toujours la mâchoire. Ses yeux se mouvaient vers la racine du nez et se confondaient en une tache trouble et sans fond, sur ce visage à demi-mort, dont les contractions rappelaient une agonie. Quand il avait faim, il tendait le cou en avant et ouvrait sa gueule rouge, agitant une mince langue de serpent et meuglant d’une voix impérieuse.

Les gens s’en allaient en se signant et en chuchotant des prières ; ils se rappelaient tout le mal dont ils avaient souffert, tous les malheurs qu’ils avaient éprouvés dans la vie.

Un vieux forgeron, homme de caractère morose, répéta bien des fois :