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OBLOMOFF.

habillé d’une veste grise, qui laissait voir la chemise sous l’aisselle, et d’un gilet gris à boutons de métal. Il avait le crâne nu comme un genou, et la face ornée de deux immenses favoris touffus, blonds, grisonnants dont chacun aurait suffi pour trois bonnes barbes.

Non-seulement Zakhare se contentait de l’image que Dieu lui avait donnée, mais il ne prenait même pas la peine de rien changer au costume qu’il avait porté à la campagne. Son habit était taillé sur un modèle apporté du village. La veste et le gilet gris lui plaisaient de plus, parce que cet habillement, presque uniforme, lui rappelait vaguement la livrée qu’il endossait jadis pour accompagner les vieux seigneurs à la messe ou dans leurs visites.

La livrée était la seule chose qui lui remît en mémoire les splendeurs de la maison des Oblomoff. Seul, cet habit retraçait aux yeux du vieux serviteur la vie seigneuriale, large et tranquille, au fond de la province. Les vieux seigneurs sont morts, les portraits de famille sont restés dans le château ; peut-être qu’ils y traînent quelque part au grenier ; les traditions de la noble famille s’effacent et ne vivent plus que dans la mémoire de quelques vieillards, qui eux aussi sont restés à la campagne. Voilà pourquoi Zakhare aimait tant son vieil habit gris.

Cet habit et certaines traces qui, dans la figure et