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OBLOMOFF.

et des fioles qu’on ne voit jamais, et qui sortent le diable sait d’où ! Allez tout surveiller, pour qu’on ne perde rien et qu’on ne casse pas tout… une moitié est là, l’autre sur la charrette, ou au nouveau logement : a-t-on envie de fumer ? on prend la chibouque et le tabac n’est plus là… a-t-on envie de s’asseoir ? pas un siège ; qu’on touche à n’importe quoi, on se salit ; tout est couvert de poussière ; et pas moyen de se laver, et on est obligé d’aller avec des mains, tiens, comme les tiennes…

— J’ai les mains propres, dit Zakhare en montrant, au lieu de mains, deux vraies semelles de bottes.

— Ne les montre pas ! dit Élie, en se détournant. Et veut-on boire ? continua-t-il, on prend la carafe, mais le verre n’est plus là.

— On peut boire à même ! fit observer naïvement Zakhare, supposant que, si ce moyen était peu en usage, c’est que peut-être il n’était pas connu de tout le monde.

— Chez vous autres c’est ainsi que tout va : on peut se passer de balayer, d’épousseter et de battre les tapis. Et dans le nouvel appartement, continua Élie, se laissant entraîner par la vive peinture que lui fournissait son imagination, pendant trois jours on ne sait se débrouiller, rien n’est à sa place : les tableaux sont par terre contre la muraille, les galoches sur le lit, les bottes dans un paquet avec le thé et la