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L’ART JAPONAIS

C’est une grande composition en largeur, dans laquelle, au-devant d’une baie ouverte de terrasse, où monte la tige verte d’un arbuste, est couché sur un banc, un homme dont la figure qui fait face, est cachée par une femme vue de dos, l’embrassant sur la bouche, et ne laissant voir du visage de l’homme qu’un peu de joue, et un morceau de menton, que sa main a pris, et autour duquel elle tourne dans un empoignement passionné.

En cette composition érotique, il y a dans l’arrangement, le dessin, le coloris, comme un art amoureux de la reproduction de la femme, de son abondante chevelure, de sa nuque frêle, de sa robe à la couleur foncée, semée de petits bouquets clairs, faits de hachures entrecroisées, et aussi comme un art amoureux de la reproduction de l’homme, de sa pose molle, de sa sensualité élégante, de sa paresse voluptueuse, de l’interruption de l’allée et venue de son éventail, portant la petite poésie allusive à la situation de l’artiste, comparée au bec de la grue, que l’on voit souvent dans les netzkés, pris dans une coquille bivalve : « Le bec fortement pincé par l’amajouri (coquille), l’oiseau ne peut plus s’envoler, » — et un éventail gris comme sa robe, la robe à l’imi-